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24.06.05

Partenaires pour la transformation

Auteur : Valson Thampu


Le bon samaritain

Le thème de la 9e Assemblée du Conseil oecuménique des Eglises (COE), qui se tiendra à Porto Alegre, Brésil, du 14 au 23 février 2006, nous invite à revenir aux ressources de la prière et à nous les réapproprier.

Dans la Bible, la prière fait partie intégrante du partenariat entre Dieu et les êtres humains. En ce sens, prier ne veut pas dire reporter la responsabilité sur Dieu, mais nous préparer à oeuvrer en partenariat avec lui. Prier en vérité, c'est être disposé à travailler aux côtés de Dieu pour faire face au sujet à propos duquel nous prions. Une prière qui élude le partenariat et fuit les responsabilités est incantatoire, elle n'est pas spirituelle.

Tout en nous invitant à prier, le thème attire notre attention sur certaines nuances spirituelles importantes:

Le monde importe à Dieu (Jn 3,16) et devrait nous importer à nous. Nous sommes appelés à renoncer à nous-mêmes (Mt 16,24), et non à renier le monde. Seuls ceux qui renoncent à eux-mêmes peuvent devenir partenaires avec Dieu pour transformer le monde. Mais transformer le monde ne peut être un mandat que les êtres humains accompliraient sans aide. Dieu a formé le monde, qui a été déformé par la rébellion humaine. Le thème reconnaît que nous ne pouvons transformer le monde par nous-mêmes, bien que, dans le même temps, nous ne soyons pas sans rapport avec la transformation du monde. Seul Celui qui a formé le monde peut le transformer. Dieu, pourtant, dans son humilité, nous invite à participer à cette entreprise suprême.

Pour être partenaires avec Dieu dans cette mission spirituelle, nous devons devenir une nouvelle création (2 Co 5,17 ; Jn 3,3). Les médecins doivent commencer par se guérir eux-mêmes!

Bénis soient les artisans du changement. La transformation semble une tâche désespérément ardue. Pourquoi ? Cela vient de la résistance que nous opposons aux changements transformateurs. Nous acceptons facilement les changements dégénératifs, mais nous nous montrons réticents à propos des changements régénérateurs.

Pour devenir agent de transformation et se laisser soi-même transformer, il est essentiel d'être d'accord de changer. On ne peut pas, comme le jeune homme riche (Mt. 19,16-22), souhaiter être transformé sans rien vouloir changer! La démarche consistant à confesser cette contradiction inhérente à la nature humaine et à s'en repentir est au coeur du thème de l'Assemblée.

Le signe authentique de la vitalité spirituelle est la disposition à accueillir favorablement le changement, en particulier celui qui va au delà des passions et des préférences de la nature ou de la commodité humaines.

La responsabilité humaine mise en évidence. Tout ne va pas bien dans le monde. Mais poser le diagnostic de ce qui ne va pas dans le monde et de dénoncer ses nombreux maux ne suffisent pas.

La spiritualité est un domaine de responsabilité (Jn 21,15-19). Ce qui fait qu'une réponse est authentiquement spirituelle n'est pas seulement la clarté du diagnostic sur ce qui ne va pas, c'est aussi l'engagement résolu à améliorer la situation. Il ne suffit pas de dénoncer, nous devons aussi être capables d'annoncer "un ciel nouveau et une terre nouvelle". Il est facile de distinguer les défauts, mais ce dont le monde a besoin, c'est de solutions aux problèmes qui se multiplient.

Dans la perspective biblique, nous sommes les porteurs de solution que Jésus envoie au monde. Tel est le sens de 'l'envoi'. Ainsi, l'envoi est une nuance dominante du thème.

La transformation et les priorités de Dieu. Pour mettre en oeuvre un tel programme, il faut une stratégie appropriée. Elaborer une stratégie, c'est fixer des priorités. Dans le contexte du thème, cela signifie accepter les priorités de Dieu.

Dans la perspective biblique, ces priorités comprennent la transformation de l'individu et la sanctification de la famille. Quant à la société, elle devrait se réorienter de l'expropriation au partage, de l'hostilité à l'hospitalité. Le résultat devrait être la "plénitude de vie" pour tous et un ordre mondial en harmonie avec les valeurs spirituelles essentielles - l'amour, la compassion, la vérité et la justice.

Du point de vue religieux, il faudrait réorienter la religiosité pour qu'elle passe de sa préoccupation pour la vie après la mort au devoir spirituel d'être parfait en ce monde (Mt 5,48). Implorer Dieu de transformer le monde n'apparaît pas comme un acte sincère si nous négligeons la nécessité de réformer notre religiosité. La religion doit être transformée en un instrument propre à éliminer l'aliénation et non à l'aggraver.

Purifier la religion était une priorité du ministère public de Jésus. Loin de la religiosité qui fuit la réalité en "passant à bonne distance" (Lc 10,31-32), nous devons nous réorienter vers la spiritualité active du Bon Samaritain, qui a des yeux pour voir et un coeur compatissant pour répondre aux besoins humains.

Telle est l'essence de la 'repentance' que Jésus a prêchée au début de son ministère (Mt 4,17). Seule une Eglise repentante peut prier en esprit et en vérité : "Transforme le monde, Dieu, dans ta grâce".

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(*) Le professeur Valson Thampu, de l'Eglise de l'Inde du Nord (CNI), est un pasteur, théologien, chercheur et écrivain de New Delhi, Inde. Il est membre de la Commission nationale de l'éducation des minorités et du Conseil national de l'intégration.